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Risques et désastres: quels plans de contingence dans un «peyi lòk»?

Publié le 2019-07-16 | Le Nouvelliste


«La seule chose qui ne soit pas en crise en Haïti, c'est la crise elle-même.» Cette phrase du professeur Yves Dorestal trouve tout son sens aujourd'hui. Le pays va très mal et rien ne fonctionne. Moi, ce que je redoute le plus, c'est un désastre naturel en plein désastre socio-politico-économique. La crise affecte toutes les institutions, y compris celles intervenant dans la gestion des risques et des désastres. Et si un cyclone ou un séisme survient, aurons-nous des plans de contingence adaptés à cette situation de «peyi lòk»?


Dans au moins une de mes premières chroniques, j’ai relaté les différentes phases dans la gestion des risques et des désastres (1). En particulier, la réponse à un désastre implique toutes les opérations menées pour éviter qu’un événement adverse prenne de l’ampleur. Le plan de contingence est le plan suivant lequel ces opérations sont menées en cas de catastrophe. En clair, c’est un guide sur lequel les responsables s’entendent sur un prépositionnement des ressources disponibles et sur « qui fait quoi, quand, comment », suivant une chaîne de commandements, en vue d'une reprise rapide des activités.  C'est un outil précieux de décision.


En général, un plan de contingence contient une analyse des risques qui débouche sur une analyse des besoins. Besoins en ressources humaines, en lits d’hôpitaux, en médicaments, en kits alimentaires, en abris provisoires, entre autres. Le plan de contingence est souvent réduit à un risque donné en un lieu donné. En Haïti, le Système national de gestion des risques et des désastres (SNGRD) élabore des plans nationaux, départementaux, communaux et même locaux. Les scénarios de catastrophe se précisent selon la vulnérabilité de l'entité géographique face à un phénomène donné (hydrométéorologique par exemple).


Une fois qu'un scénario est retenu par le Secrétariat permanent de gestion des risques et des désastres (SPGRD), on va faire l'inventaire des ressources disponibles et déterminer les besoins des sections communales, communes, entre autres. Cela permet de savoir quelles ressources mobiliser et quel budget prévoir. On va également identifier les actions à entreprendre pour un accès ordonné à ces ressources. Notons qu'il y a aussi des plans de contingence par secteur (agriculture, santé,…): un secteur peut concevoir un plan de contingence spécifique répondant au mieux à sa réalité.


Force est de constater que les plans de contingence ne sont pas financés à la lettre ou alors un peu d’argent est débloqué à l’arraché à l'approche d'un cyclone sans tenir compte du plan. Ainsi, le SPGRD s'assure d'au moins un prépositionnement de stocks alimentaires - bien qu’insuffisants - dans les Centres d'opérations d'urgence (COU). À la catastrophe, les acteurs politiques non impliqués dans l'élaboration du plan se prêtent souvent à l'improvisation. Des élus ont alors la latitude de contrôler les aides humanitaires et les détourner. Ne pourrait-on faire mieux? Est-ce voulu pour faciliter la corruption dans la gestion de l’urgence?


Des mises à jour sont effectuées tous les ans dans les plans de contingence cycloniques. Cette année, la mise à jour doit être plus compliquée, tant les paramètres sociaux changent du jour au lendemain. Prenons un exemple simple: la présence de la troupe du chef de gang Arnel Joseph dans l'Artibonite rendra extrêmement difficile la réponse aux urgences. Ces hommes voudront accaparer l'aide humanitaire dans le département, voire détourner la destinée de l'aide aux autres départements du grand Nord. Cette situation pourrait conduire à une catastrophe humanitaire grave.


La cession du pays aux bandits armés, c'est la pire chose qui puisse nous arriver.


Cette saison cyclonique s'inscrit dans un contexte socioéconomique particulièrement difficile. Les hôpitaux sont insuffisants ou mal équipés. Les Centres d'opération d'urgence qui bénéficient peu d'attention de l'État sont de moins en moins aptes à répondre aux urgences. Les morts de Carrefour et de Port-au-Prince à la suite des récentes intempéries prédisent que tout cyclone peut faire très mal cette année. La chute libre de la gourde entraîne aujourd'hui un taux d'inflation de 18%, cela implique ipso facto que la population aura plus de mal à se relever d’une catastrophe. À un moment où l'État perd tout contrôle du territoire, nous ne pouvons qu'espérer que la nature nous sera clémente.



Newdeskarl Saint Fleur


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